Allons-nous surmonter rapidement la crise du coronavirus ?
Que nous apprennent les autres crises sur le coronavirus ?
En quelques mois, le baril de Brent est passé de 60 dollars avant de fortement chuter, passant même sous les 20 dollars. Mais un cap historique a été franchi avec le baril WTI qui s’est vendu à prix négatif. Il fallait donc payer pour s’en débarrasser. Pourquoi les cours du pétrole ont-ils chuté, et pourquoi seul le WTI était négatif ? La crise du coronavirus est bien évidemment passée par là, mais ce n’est pas la seule raison.
Reprenons d’abord nos vieux cours d’économie. « Le marché pétrolier fonctionne de manière classique : sur la loi de l’offre et la demande », explique Marc Danneels, Chief Investment Officer chez Beobank. « Les pays producteurs (OPEP, Russie, USA,..) peuvent diminuer leur capacité de production pour supporter les prix, et vice-versa. Et la demande dépend de l’activité économique dans le monde ». La réduction d’activité commerciale et industrielle suite aux mesures de confinement a entrainé de facto une réduction de la demande de pétrole. Mais si le coronavirus a fait chuter la demande de pétrole, notamment en Chine, ce n’est pas la seule explication.
La crise a été amplifiée par la guerre commerciale livrée début mars entre les Saoudiens et les Russes sur les quotas de production. L’échec des négociations sur une baisse de production pour soutenir les cours a laissé des traces. Et ce n’est qu’après avoir vu le marché inondé de barils à bas prix que les Russes sont revenus à la table. « Ce n’est qu’en début de mois passé qu’un accord a été trouvé pour diminuer la production de 10% », clarifie Marc Danneels. Sans succès. « Cette réduction de la production n’a pas été suffisante pour contrer la baisse de la demande de pétrole en raison de la réduction drastique de l’activité économique ». L’OPEP prévoit ainsi une baisse de la consommation de 6,85 millions de barils par jour par rapport à l’année passée !
La demande a tellement baissé que le baril WTI (West Texas Intermediate) est même passé en négatif, jusqu’à -37 dollars en avril. Pourquoi ? « Contrairement au baril de Brent, les contrats à terme de pétrole de baril WTI sont livrés physiquement. Dans un contexte normal, le pétrole de ces contrats, aussi appelés futures, est livré et stocké à Cushing dans l’Oklahoma » explique le Chief Investment Officer de Beobank. « Mais le pétrole est également un outil de « trading », donc un actif commercial pour de nombreux acteurs financiers. Les détenteurs – acteurs financiers- sur papier de pétrole devaient donc s’en débarrasser sous peine de recevoir la livraison du pétrole et payer des coûts de stockage. Des coûts plus importants en raison d’un manque de capacité de stockage, suite à la baisse de la demande ». Ce qui a entrainé une baisse de la demande drastique, au point de passer sous le zéro. « Mieux valait payer pour s’en débarrasser ! ».
En quoi est-ce forcément des mauvaises nouvelles ? Un baril bas ne veut-il pas forcément dire un impact positif pour le consommateur final d’essence ? Marc Danneels tempère : « Oui, mais dans un contexte économique normal. Cela réduit l’inflation et aide à augmenter le pouvoir d’achat ». Nous ne sommes malheureusement pas dans un contexte normal. « Cet impact est marginal pour le consommateur, mais il est bien plus négatif pour l’économie. Il y aura une augmentation des faillites dans le secteur pétrolier et dans ceux qui y sont liés. Des conséquences aussi sur les budgets de régions et pays qui dépendent des revenus du pétrole (l’Algérie, le Nigeria, l’Arabie saoudite…) ». Le Chief Investment Officer ne souhaite pas être un oiseau de mauvais augure, mais les perspectives ne sont pas réjouissantes. « Un climat de récession lié au coronavirus et une demande et un cours toujours bas auront un impact économique et social à long terme clairement négatif ».
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