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Pourquoi la politique de la BCE, après la réduction récente des taux, sera plus que jamais déterminée par les États-Unis.
Au début de cette année, l'on s'attendait généralement à ce que la croissance économique en Occident, principalement aux États-Unis et dans la zone euro, diminue sensiblement. Cependant, on constate que la croissance sous-jacente aux États-Unis se maintient à environ 2,5 %1. En Europe, nous observons également des signes de reprise économique, après que l'économie ait flirté avec une croissance nulle ces derniers mois. Le revers de la médaille est que l'inflation de base reste structurellement à un niveau (trop) élevé en Europe. Fin avril, elle s'élevait à 2,7 %2, bien au-dessus des 2 % que la Banque centrale européenne (BCE) considère comme idéals pour protéger notre pouvoir d'achat.
Comme nous le savons, la BCE dispose d’un l'instrument pour lutter contre cette inflation. En augmentant (ou en diminuant) le taux de dépôt, le taux auquel les banques sont rémunérées lorsqu'elles détiennent de l'argent auprès de la BCE, la banque centrale peut freiner (ou encourager) l'activité économique, entrainant une diminution (ou une augmentation) de l'inflation.
Dans le contexte actuel, la BCE est cependant particulièrement prudente lorsqu'il s'agit de prendre des décisions de taux. Une politique monétaire "restrictive" risque en effet de nuire à la croissance économique vulnérable... Plus que jamais, la BCE indique donc surveiller de très près les données économiques - principalement les chiffres de l'inflation, les données sur l'emploi et les paramètres de croissance économique - pour aligner leur politique de taux (future).
Avec ces données en tête, et malgré l'inflation (trop) élevée, la BCE a décidé lors de sa réunion du 6 juin de baisser le taux directeur de 0,25 % afin de soutenir la croissance économique fragile. Il s'agit de la première baisse de taux depuis septembre 2019. Cette réduction était toutefois attendue : le consensus du marché concernant une réduction des taux de la BCE était déjà tellement intégré dans les actifs financiers que ne pas procéder à cette - petite - réduction aurait pu avoir un impact négatif important sur les marchés financiers... et sur la confiance dans la BCE.
Deux questions importantes détermineront si la réduction des taux en juin est unique, ou si la BCE continuera également à ajuster les taux à la baisse par la suite. En premier lieu – bien sûr – l'évolution de l'inflation. Les économistes de la BCE voudront des signes que l'inflation salariale, dans un marché du travail tendu au sein de la zone euro, et que l’inflation élevée du secteur des services (sensible aux salaires), commencent à diminuer de manière durable. Si c'est le cas, de nouvelles réductions de taux seraient attendues.
Mais surtout, on observera avec une grande attention ce qui se passe de l'autre côté de l'Atlantique. La politique de taux d'intérêt de la BCE devra principalement tenir compte des données économiques aux États-Unis et de la politique monétaire de la banque centrale américaine, la Fed, qui en découlera.
Actuellement, la Fed maintient un taux de dépôt dans une fourchette entre 5,25 % et 5,50 %3, contre 3,75 %4 pour la BCE. La BCE voudra à tout prix contrôler cet écart de taux. Si l'écart devient plus grand, l'euro pourrait en effet se déprécier davantage par rapport au dollar. Déjà, la parité euro/dollar, où 1 euro vaut exactement 1 dollar, est en vue. Cela serait, sauf pour une courte période en 2022, la première fois depuis 2002. Au sommet, en 2008, un euro valait plus d'un dollar et demi. Début de cette année, vous obteniez encore environ 1,10 dollar pour 1 euro5.
Un dollar structurellement plus fort que l'euro rend les importations plus coûteuses pour l'Europe, avec une pression inflationniste à la hausse. Exactement ce que la BCE veut éviter. En plus de surveiller attentivement les chiffres macroéconomiques en Europe, les économistes de la BCE suivront donc de près les actions de leurs homologues de la Fed. Il semble que la BCE adoptera une politique miroir et se contentera pour l'instant d'une seule baisse des taux, tant que la Fed n'assouplira pas progressivement sa politique de taux. D'ailleurs, la Fed se réunira également le 11 et 12 juin pour discuter de la politique des taux, quelques semaines donc après la BCE. Une réunion qui sera suivie avec une attention particulière en Europe...
Quoi qu'il en soit, il est clair qu'aujourd'hui, de chaque côté de l'Atlantique, nous avons atteint le pic des taux. Ce n'est pas insignifiant dans le contexte des quelque 22 milliards d'euros d'économies qui seront disponibles à partir de septembre, à l'échéance de l'obligation d'État d'un an. Il est important pour les épargnants et les investisseurs d'éviter le piège des taux élevés à court terme. Un taux attractif à court terme peut signifier, à la lumière de la baisse des taux qui est maintenant amorcée et qui devrait probablement se poursuivre l'année prochaine, qu'il faudra réinvestir à un taux plus bas à l'échéance. Il est donc recommandé de diversifier en fixant les placements en espèces sur différentes échéances pour répartir l'exposition aux taux, mais aussi de rechercher des sources de rendement à long terme dans les segments actions et obligations.
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