Céder son entreprise, c'est aussi prendre un nouveau départ
Comment organiser votre nouvelle vie après avoir cédé votre entreprise?
Murielle Machiels : « Il est important de bien gérer cette phase. Le cédant va, durant celle-ci, devoir apprendre à lâcher prise. Ce n’est plus sa société. Il va devoir accepter que le repreneur fasse des choses différentes et différemment. Mon expérience m’a appris que l’on ne sait pas lâcher prise mentalement. Ce n’est pas parce que je dis ‘laisse tomber, ce n’est pas grave’ que l’on arrive à la faire. Au contraire, souvent on se braque. Lâcher prise, bizarrement, passe par le corps. Quand on est plus détendu musculairement, plus relax, c’est plus facile. »
M. M. : « Du côté du repreneur, il faut écouter mais aussi prendre soin des gens. Cela signifie, par exemple, que si l’on est amené à se séparer de personnes – cela peut arriver –, il faut le faire avec bienveillance. Durant cette période de cohabitation entre le repreneur et le cédant, ce dernier sera, en permanence, en manque de reconnaissance car le nouveau dirigeant changera plein de choses. Le cédant va vivre cela en pensant qu’il faisait mal son boulot. Et ce qui peut arriver, c’est que des employés mécontents des changements aillent se plaindre auprès de lui. Inconsciemment, comme il se sent en manque de reconnaissance, il nourrira le mécontentement éventuel de certains employés. Même si son but n’est pas d’embêter le repreneur. »
M. M. : « Il doit bien comprendre les peurs du cédant et continuer à l’écouter et à le rassurer. C’est pareil avec les employés. Bien expliquer que les changements qui interviennent ne remettent pas en cause ce qu’ils ont fait par le passé. Il doit comprendre qu’il existe une différence entre ce qu’il veut faire et la manière dont c’est perçu. Et même quand il veut changer avec de bonnes intentions, cela peut être très mal vécu. Cette situation arrive à chaque fois et est permanente durant la phase de transition. C’est seulement plus tard que le repreneur recevra confirmation que ce qu’il a fait était une bonne idée. Chacun a ses peurs et interprète le changement en fonction de celles-ci. Quand un problème survient, il faut réécouter les gens. »
M. M. : « C’est plus large que cela. Le repreneur devrait consacrer autant de temps aux choses positives qu’aux choses négatives. Les transformations qui réussissent sont celles où l’on a une bonne mesure entre ce qui va bien et ce qui va mal. Il faut beaucoup célébrer les succès, même petits. Car si on ne le fait pas, on a l’impression de ne travailler que sur le négatif et que rien ne va. Or, ce n’est pas évident. Dans notre culture, on pointe naturellement le négatif plutôt que le positif. Il faut mettre l’accent sur les deux pour se donner les meilleures chances de réussir. Il faut également tenir compte que la société a une culture et sa culture est la somme des habitudes des gens qui y travaillent. Pour les changer, il faudra du temps. 66 jours, en moyenne. C’est pourquoi il faudra répéter les choses jour après jour pour mais toujours avec bienveillance. »
Ancienne CEO des Éditions Plantyn, Murielle Machiels conseille aujourd’hui des organisations dans le cadre de l’adaptation aux changements rapides du marché induits par la numérisation. Forte de son expérience et de l’approche qu’elle développe via sa société QiLi, elle aborde pour Beobank les aspects humains à ne pas négliger lors des différentes étapes cruciales de la transmission et de la reprise d’une entreprise.
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