Investir en période de crise ? Un bon réflexe !
L’économie mondiale est toujours à la traîne. S’il est vrai que ces dix dernières années, les États-Unis n’ont pas connu de croissance aussi positive qu’au premier semestre 2014, l’Europe tire pour sa part moins bien son épingle du jeu. Et les pays émergents, en dehors de l’Inde, vont même jusqu’à franchement décevoir. Alors, faut-il épargner plutôt qu’investir ? D’après Pascal Paepen éditorialiste et professeur à la KU Leuven, ce n’est pas forcément la meilleure idée.
L’économie des Etats-Unis se redresse
Depuis 2012, l’économie des États-Unis reprend du poil de la bête grâce aux mesures drastiques de la FED (la banque centrale des États-Unis) en vue de pallier la crise. Le taux à court terme a été ramené à 0 % et le taux à long terme (sur 10 à 30 ans) a aussi été sensiblement revu à la baisse. La FED a pour ce faire acheté d’innombrables obligations d’État et hypothécaires. On pourrait dire que la banque centrale américaine s’est mise à imprimer des dollars en masse. Résultat : un rétablissement du marché immobilier et un taux de chômage d’un niveau presque normal, pour une économie qui renaît. Et Wall Street a déjà anticipé ces phénomènes. On a ainsi pu y constater une forte hausse du cours des actions, bien que certaines actions américaines continuent de valoir le détour. Les obligations en dollars sont par contre très chères, et en acheter maintenant ne serait donc pas avisé. La FED a en effet mis un terme à son programme de rachat de la dette publique, ce qui pourrait fort probablement provoquer l’augmentation du taux à long terme. Le risque de perte de vitesse pour les obligations en dollars à long terme est trop élevé. Vous pouvez en revanche éventuellement acquérir des obligations en dollars à court terme pour encore profiter de la hausse annoncée de la devise américaine.
Des conseils plus qu’avisés
L’économie européenne est loin d’être aussi solide que celle du pays de l’oncle Sam et les prévisions de croissance de l’Europe sont constamment revues à la baisse. Les pays qui connaissaient autrefois des problèmes se portent relativement bien. Les plans de sauvetage de l’UE et du Fonds monétaire international d’une part, et les mesures d’économie rigoureuses d’autre part, ont tout d’abord généré une période de vaches maigres, mais les États membres les plus touchés par la crise semblent à présent connaître des jours meilleurs. Ou n’est-ce qu’une illusion ? L’Irlande, libérée du plan de sauvetage qui lui avait été imposé, a affiché la meilleure croissance en 7 ans, à l’instar de l’Espagne. Et la Grèce a pour sa part de nouveau pu vendre des obligations d’État en raison de l’important recul des taux. Le taux de chômage demeure toutefois très élevé dans ces pays, et la situation est donc loin d’être idéale. Après des chiffres très prometteurs, l’Italie entre de nouveau en récession, tandis que la deuxième plus grande banque du Portugal traverse une tempête sans précédent.
On peut donc se demander s’il est intéressant d’investir dans la zone euro ? Assurément ! Bon nombre d’entreprises profitent en effet de la chute historique des taux et affichent d’excellents résultats. La hausse du billet vert représente un avantage concurrentiel pour les exportateurs européens. Mais pour ce qui est de la croissance économique du Vieux Continent en général, le pessimisme sera encore au rendez-vous pendant un certain temps. De belles opportunités d’investissement continueront certes de se présenter, mais la prudence restera de mise. Pour éviter tout faux pas, il est dès lors conseillé de vous faire aider par votre conseiller en investissement, qui vous fournira des conseils adaptés à votre appétit au risque.
Des mesures qui ont aussi des désavantages
Comme on pouvait s’y attendre, la population n’a pas réservé un accueil des plus chaleureux aux mesures d’économie et à la modération salariale qui en découle. Et ce n’est pas uniquement le cas chez nous. Si ces mesures sont une nécessité à long terme, elles risquent en revanche de freiner la croissance économique à court terme, ce qui ne serait pas une bonne chose. Le chômage culmine en effet à un niveau inquiétant depuis de nombreuses années, surtout chez les jeunes, phénomène que l’on doit en majeure partie à l’immobilité qui règne sur le marché du travail dans bon nombre de pays européens, dont la Belgique. Au Royaume-Uni et aux États-Unis, il est bien plus facile de licencier du personnel, et on constate une augmentation plus rapide des recrutements à mesure que la situation s’améliore. Même en Allemagne, les chiffres macroéconomiques de ces dernières semaines déçoivent. Le moteur de l’économie européenne souffre d’une diminution des exportations vers la Russie en raison des sanctions imposées par l’UE dans le cadre du conflit ukrainien, mais aussi d’un recul de la demande chinoise. Et encore plus à cause des déboires de deux de ses principaux partenaires économiques, à savoir la France et l’Italie.
Des opportunités intéressantes
À terme, les perspectives de la zone euro seront probablement meilleures que celles du Japon, dont la bourse a atteint son niveau le plus élevé depuis 7 ans. Le pays est cependant toujours confronté à un sérieux problème de vieillissement et de pensions et affiche une dette publique de près de 250 %. Pour ce qui est des pays émergents, ils n’échappent pas à la règle et déçoivent également : le Brésil connaît un important recul, tout comme la Russie et la Chine. Et à l’heure où je vous parle, l’Inde est la seule à sortir positivement du lot, ce qui se traduit par des cours d’actions en hausse pour les entreprises indiennes. Je continue toutefois de penser que le centre du monde économique, mais aussi militaire, se déplacera à long terme en Asie (Chine). Avec un ratio cours/bénéfices moyen de 10, la bourse chinoise n’est actuellement pas chère. Des opportunités se présentent également dans les pays d’Amérique latine, où la perte de vitesse économique temporaire peut s’avérer intéressante pour les investisseurs possédant un long horizon d’investissement.
Pascal Paepen est éditorialiste et enseigne « Bank en Beurs » à la KU Leuven, sur le Campus de Bruxelles et à la Thomas More Hogeschool.
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