Aider les Grecs, mais aussi les entrepreneurs belges
Face à la crainte d'une éventuelle sortie de la Grèce et d'éventuelles conséquences dramatiques pour la zone euro, le message de Roland Gillet (professeur à la Sorbonne à Paris et à l'école Solvay) est simple. «D'abord, le citoyen européen doit cesser de penser que nous avons donné de l'argent aux Grecs depuis le début de la crise», explique-t-il. «Rien n'est plus faux. Les gouvernements de la zone euro ont prêté de l'argent à la Grèce mais à des taux tellement élevés au début de l'aide que ce pays avait peu de chance de se relever. Ensuite, les Grecs ont aujourd'hui davantage besoin de notre expertise, notamment en gestion publique, que de notre argent.»
Reconstruire avec les Grecs
En conséquence, l'idée de cet expert au sein de différents groupes de réflexion au niveau international est qu'il faudrait faire des concessions sur les intérêts de la dette grecque. «En contrepartie, nous pourrions participer avec eux, pas contre eux, à la remise en place de la machine administrative et économique du pays. Certes, outre les réductions en intérêt, pareille aide coûterait sans doute de 2 à 3 milliards d'euros par an aux Européens. Mais au moins, il y aurait une chance de réformer ce pays ainsi que ses institutions administratives.»
De plus, l'allègement des intérêts aurait un impact direct sur le budget de la Grèce et offrirait un ballon d'oxygène pour redynamiser l'économie, et surtout doper le moral de ces nombreux citoyens qui sont saignés à blanc depuis plusieurs années. Nombre d'Allemands en sont d'ailleurs conscients, car ils se souviennent que la réunification de leurs deux pays s'est soldée par un transfert – et non par des prêts – entre l'ex-Allemagne de l'Ouest et l'ex-Allemagne de l'Est. Bien entendu, ce transfert n'a pas été uniquement solidaire mais responsable, car il a été conditionné par des efforts importants mais réalistes demandés à la population de l'Allemagne de l'Est. Le résultat n'a pas été vain puisqu'aujourd'hui ce pays est de loin le plus puissant d'Europe!
Revoir la fiscalité belge
Dans le même ordre d'idée, Roland Gillet pense que le gouvernement belge actuel devrait profiter du «tax shift» (glissement de la fiscalité de l'impôt sur les revenus vers d'autres sources d'impôt) pour redonner du tonus aux entrepreneurs. La raison? Le système belge pénalise les entrepreneurs, en faisant peser une fiscalité trop lourde sur leurs épaules avant et pendant leur croissance, sans oublier le fait que notre fiscalité donne encore un avantage considérable à l'endettement au détriment des fonds propres. «S'ils échouent, ces entrepreneurs supportent toutes les pertes. Et s'ils arrivent au chômage, leur couverture est inférieure à celle d'un salarié du même âge. Et s'ils réussissent, avant même qu'ils commencent à relever la tête, on estime légitime de prélever 50% sous forme d'impôts, comme si le risque d'entreprise ne devait pas être rémunéré», conclut-il.
Le professeur Roland Gillet
- Docteur en sciences économiques (UCL & Harvard University, 1991).
- Professeur de finance à la Sorbonne et à la Solvay Brussels School of Economics and Management (ULB).
- Il a également enseigné dans plusieurs universités à travers le monde, notamment en Pologne, au Canada, en Chine et aux États-Unis.
- Il est l'auteur de plusieurs ouvrages et de nombreux articles dans des revues scientifiques portant sur la gestion de portefeuille, l'évaluation des actifs réels et financiers, et l'efficience et la microstructure des marchés financiers.
- Il est également expert au sein de groupes de réflexion internationaux et conseiller scientifique auprès d'institutions publiques et privées.
Le professeur Roland Gillet prendra la parole lors de notre prochaine conférence sur les investissements le 17 juin à Charleroi. Plus d'infos et inscriptions sur www.beobank.be/Conferences
(inscription possible un mois avant la date de la conférence).
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